Les Carnets d'Albert Camus
Cet article a été publié le 13 septembre 2019
Pour la seconde année consécutive, Le Lucernaire met à l’affiche Les Carnets d’Albert Camus, une très belle pièce jouée et mise en scène par Stéphane Olivié-Bisson.
Les Carnets d’Albert Camus parus à titre posthume chez Gallimard en 1962 furent écrits entre Mai 1935 et décembre 1959. ils sont adaptés au théâtre pour la première fois par Stéphane Olivié-Bisson avec la collaboration de Bruno Putzulu.

A la croisée du journal de travail et du journal intime, ces textes sont difficiles à classer. Ce sont en quelque sorte des pensées métaphysiques sans lien apparent entre elles qui, lorsqu’on prend du recul, dessinent un portrait pointilliste d’Albert Camus. Stéphane Olivié-Bisson en a sélectionné quelques extraits qui abordent les thèmes majeurs de l’œuvre et les a ordonnées de façon chronologique et géographique. Chaque étape de la pièce correspond à un moment marquant dans la vie de l’auteur ; son enfance à Alger, sa désillusion à Paris, son rapport à la vieillesse en Provence, sa solitude en mer.
« Je me force à écrire ce journal, mais ma répugnance est vive. Je sais maintenant pourquoi je ne l’ai jamais fait: pour moi, la vie est secrète »
2 août 1958 - Les Carnets, volume III
Paradoxalement, le décor de la pièce est abstrait, il est composé d’une parcelle de cailloux blancs au centre de la scène à laquelle le comédien revient toujours. La pierre, ce minéral qui résiste au temps, fait écho aux obsédantes questions sur la mort qui tourmentent l’auteur. Elle fait également référence aux éléments naturels fondamentaux dont Camus a tant besoin pour vivre.
Avec ces pierres, Stéphane Olivié-Bisson a peut-être aussi voulu faire résonance à la naissance du philosophe dans un milieu pauvre. En effet, le comédien aime qualifier affectueusement Camus de « pousse-cailloux » en évoquant ses origines. Cette pauvreté a marqué la pensée de l’auteur ainsi que ses œuvres qui parfois critiquent sévèrement la bourgeoisie. Les extraits choisis montrent d’ailleurs un Camus contradictoire qui se contente de la pluie, du soleil pour être heureux, mais qui n’arrive pas à se retrouver dans le monde des hommes.

Coté cour, à chaque étape de la pièce, un écran présente des lieux difficiles à situer. Même Paris n’est montré que par des toits embrumés. En effet, Les Carnets étant un recueil de réflexion et non pas une autobiographie, nous sommes plus dans la tête de Camus que dans sa peau. Le texte, en tout point subjectif, ne décrit pas ce que l’auteur voit mais ce qu’il ressent. Avec ce seul en scène, Stéphane Olivié-Bisson nous montre Albert Camus seul face au monde.
Un thème revient sans cesse, celui de la solitude parfois choisie, parfois subie. Et si ce recueil était en réalité un carnet de bord d’un esprit naviguant dans la solitude...
Les carnets d'Albert Camus - Le Lucernaire
53 Rue Notre Dame des Champs, 75006
du 26 août 2020 au 27 septembre 2020 Du mardi au dimanche à 19h00
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