Cet article a été publié le 29 octobre 2017. A cette date, la pièce était jouée au Théâtre du Petit Montparnasse.
Dans un monologue constitué d'extraits de textes et d’interviews publiés chez Stocks Sous le titre de Je ne renie rien, Caroline Loeb se pare du masque de Françoise Sagan au théâtre du Lucernaire
Comme ça fait du bien de retrouver l'éternelle Sagan. Ses réflexions éminemment modernes sur les êtres humains, la sexualité, le bonheur, la télévision nous touchent toujours autant. Son humour subtil et aiguisé fait mouche. Dans cette pièce, on réfléchit, on rit mais on s'ennuie un peu aussi...
Il faut le reconnaître, dans la forme, le spectacle est réussi. Caroline Loeb croque un personnage touchant. La scénographie est simple et efficace. Sagan évolue dans un environnement intime entre lumière et obscurité. Le décor résume bien la vie de la romancière: un comptoir, un tabouret et un cendrier qui déborde. Pourtant, Alex Lutz est passé totalement à côté du sujet. La moitié du temps les bras croisés, l'autre moitié le dos voûté, où est donc le "charmant petit monstre" ? On a cru l’apercevoir une seconde pourtant en voyant sa mèche blonde briller sous la lumière des projecteurs. L’atmosphère tamisée maintient un peu l’illusion mais ce sosie n’a en commun avec Sagan que la manie de remplir les cendriers.
Ce personnage totalement contradictoire n'a rien à voir avec l'auteure effrontée: on nous dépeint une femme déprimée qui dit ne s'être jamais sentie aussi vivante que lorsqu'elle se noyait dans l'excès. Alors que Françoise Sagan revendiquait son goût pour les alcools forts, sa soif de vitesse, et son attrait pour les jeux d’argent, le collage des textes résume les belles voitures à son accident, la célébrité à un sentiment d’oppression et l’argent à son incapacité à le gérer.
“Si tout était à recommencer, je recommencerais bien sûr, en évitant quelques broutilles : les accidents de voiture, les séjours à l’hôpital, les chagrins d’amour. Mais je ne renie rien”
Françoise Sagan - je ne renie rien.
A vouloir absolument éviter l’écueil de l’insouciance, ils ont fabriqué un personnage certes touchant mais terne, très loin de l'éclatante romancière, engendrant d’ailleurs des dissonances entre le texte et l'attitude du personnage. Cet homonyme tourmenté semble osciller entre nostalgie et dégoût du monde. Rendez-nous Françoise Sagan
Françoise par Sagan - Théâtre Lepic
1 Avenue Junot 75018 Paris
Du 14 février au 10 mars 2019 Du mardi au samedi à 19h00 Le dimanche à 18h00
De 12€ à 28€